vendredi 18 mars 2016

Zone franche

Elle l’a connu dès l’enfance : il était le presque-frère, le compagnon de jeu protecteur, fascinant… Ils se retrouvent à l’âge où l’on s’adonne à des jeux beaucoup plus troubles. Marginal assumé, V. courtise le risque avec désinvolture au sein de la zone franche où s’affairent en ombres chinoises les acteurs de l’économie et de la « diplomatie » parallèles. Elle s’en inquiète, non sans lui trouver des raisons. Mais tout en la comblant d’égards, tout en l’invitant à le suivre dans ses rendez-vous à haute tension, V. la tient à distance, joue avec ses sentiments, non sans quelque perversité. Or, cet homme-là, depuis toujours, elle le veut…
Zone franche
Elen Brig Koridwen 2016

Merci à Elen Brig Koridwen.

Cette couverture est sublime, à la fois élégante et très claire quant aux intentions du récit. Il me fallait donc évidemment découvrir si le contenu serait à la hauteur de cette illustration. Après l’avoir lu, je peux vous dire que je suis assez contente, même s’il y a eu quelques fausses notes discrètes.

Parfois, vous lisez des romans, et vous vous dites que c’est bien écrit, que c’est fluide, que c’est sympa. Il s’agit d’un certain nombre de critères que nous aimons retrouver dans nos lectures car ils les rendent agréables, simples. Ce roman les regroupe tous, mais le style de l’autrice amène plus que ça : un style bien à elle, une sorte d’identité. Je pense qu’elle fait partie de ces auteurs dont on sait reconnaître la plume d’un roman à l’autre.

Agrémenté d’une langue très riche, ce style ne peut donc que plaire (ou bien être détesté…) et vous plonger dans l’histoire, somme toute très intéressante. J’ai bien aimé découvrir la vie de la narratrice, son amour éperdu pour V., sa résistance, sa non-résistance, son évolution. Elle sait ce qu’elle veut et fera tout pour l’obtenir, envers et contre tous. Son caractère aidant, on ne peut que la suivre dans cette entreprise ambitieuse.

Et là, vous vous demandez où sont les fausses notes. Il y en a deux : d’abord, cette dépersonnalisation des personnages de l’histoire. Je trouve dommage de ne pas nommer les personnages. V., Mademoiselle G., A… Même si certains sont nommés, beaucoup restent des anonymes, et cela n’aide pas à les apprécier ou à rentrer dans leur monde. On reste distant, loin d’eux, comme exclus de leur univers, et je n’aime pas vraiment me sentir étrangère à ces personnages dont je découvre la vie.

Le second point noir se trouve au niveau de la structure du texte. Les scènes se suivent, on passe de l’une à l’autre, sans vraie transition. Le Caire à un moment, Paris à un autre, une ellipse temporelle par-là. Cela donne un petit côté volatile au roman, mais aussi cet aspect brouillon qu’ont les romans sans chapitrage, sans structure bien définie et carrée. Ici, ce n’est qu’un avis personnel, car certains s’y retrouveront peut-être, et j’avoue que, dans des nouvelles, c’est agréable de se laisser aller au fil de l’eau. Mais pour un format roman, j’aime qu’il y ait un minimum de structure.

Deux points noirs qui sont en réalité plutôt gris et qui ne dépendent, je pense, que de la subjectivité de mon ressenti. Avec cela, j’ajouterai que certains passages auraient pu être étoffés, et cela aurait sûrement aidé à structurer un peu le récit, à le rendre plus vrai, et peut-être même à personnifier certains personnages. Avec des « si », on peut évidemment tout faire et tout penser. Néanmoins, ces petits points négatifs n’ont rien retiré à mon plaisir lors de la lecture de ce roman.

Élégant, intéressant, et surtout avec un style très prononcé, je ne peux que vous conseiller cette lecture, pour passer un petit moment sympathique et, qui sait, vous poser quelques questions !

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