vendredi 12 mai 2017

Les ravagé(e)s

Des défilés de DRH adeptes du droit de cuissage à qui on accorde l’immunité, des freaks shows anatomiques récidivistes de dix heures du matin, des beaux-pères tendancieux protégés comme devraient l’être les enfants, des larmes, des éclats de voix, des déclarations à digérer avec une citrate de bétaïne, des victimes suspectées d’être coupables et vice-versa… C’est la promenade de santé d’Alex. Alex est flic, mère célibataire et sobre, contrairement à ce qu’une analyse de ses déchets domestiques pourrait laisser croire. Elle officie aux crimes et délits sexuels d’un commissariat du nord de Paris. Épaulée par Marco, supervisée par le commissaire Blondeau, entourée d’une flopée de flics et de techniciens au teint bistre des mauvais cafés avalés à la chaîne et des lendemains de cuite, et bientôt filmée par un jeune loup soi-disant documentariste, on pourrait la croire blasée. Mais dans le flot régulier des plaintes pour harcèlement, viol et autres attentats à la pudeur, deux cas récents ont joué à créer des remous. Deux agressions et un refus net de porter plainte. Question d’honneur. À partir de là, difficile d’avancer sans encombre. Mais le caractère extraordinaire de l’événement mérite qu’on s’y penche. Peu importe le temps que ça prendra. Peu importent les moyens minables mis en œuvre, les systèmes de pensée déficients, les mauvaises habitudes.
Les ravagé(e)s
Louise Mey 2016

Merci aux Éditions 12-21.

Quelle lecture, quel thème, quelle ambiance ! Alors, avant tout, sachez que je crie au coup de cœur intégral ! Ce livre m’a bluffée, et pourtant j’avais été en quelque sorte prévenue que j’allais m’attaquer à une bombe, mais je pensais qu’elle serait artisanale, et non nucléaire. Un roman incroyable qu’il faut absolument lire.

Pourquoi ? Deux raisons : la première, c’est parce qu’il est vrai. Il se passe en France, avec des flics qui doivent subir la pression d’en haut pour obtenir des résultats, la pression d’en bas car ils doivent supporter leurs enquêtes et le côté humain de celles-ci, la pression d’à côté avec des journalistes qui veulent tout savoir sur tout de leur activité, et qui en plus doivent aussi gérer leurs propres problèmes personnels. Avec tout ça, ils ont de quoi faire, les pauvres.

Ce titre m’avait été décrit comme « sans filtre ». C’est exactement ça. On observe la police dans ce qu’il y a de plus terrible. Même si cette division ne s’occupant que de crimes sexuels n’existe pas en France, on ressent quand même ce côté réaliste qui nous frappe de plein fouet et qui nous fait aimer ces flics qui donnent tout leur temps et leur santé pour tenter d’aider un peu quelques personnes, malgré toutes les barrières auxquelles ils doivent faire face.

Les personnages sont vrais, humains et on les plaint. On les comprend, on culpabilise de ne rien pouvoir faire pour les aider, et on les suit en les encourageant dans leurs tâches périlleuses. Je me suis sentie dans ce commissariat, avec eux, à investiguer pendant ces longs mois d’enquête vaine et hasardeuse.

La seconde raison qui doit vous pousser à lire ce livre, c’est qu’il est original. Il vous propose une enquête de viols pas comme les autres, où les victimes sont des hommes, et qui sont apparemment choisis au hasard. Rien que pour avoir osé nous proposer cette thématique, Louise Mey mérite d’être lue ! Elle sort en effet des sentiers battus et nous offre une histoire inédite, originale, avec des personnages qui ont une personnalité, des secrets, des envies, des désespoirs.

Cette lecture, je m’en souviendrai longtemps. Elle n’est pas banale, et je comprends que toutes les chroniques que j’ai lues jusqu’à présent aient été aussi positives et enthousiastes. Je rejoins le lot et j’espère que vous déciderez de lire cette merveille aussi !

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